26 sept. 2008

Réclame


J’ai reçu récemment cet ouvrage :
Enfin un pendant made in France à un bouquin qui a marqué un certain nombre d’économistes en herbe : Freakonomics. Contraction de « Freak » (que l’on peut traduire, selon le contexte par « original » ou « phénomène de foire ») et de « Economics » (que l’on peut traduire, selon le contexte, par « art de bien administrer la maison » ou « art de se contredire tous les 6 mois sur des concepts de base avec un aplomb digne de BHL »).
J’incise ici : Freakonomics, sorti en 2005, est aujourd'hui le livre d’éco le plus lu aux Etats-Unis (on trouve ici une traduction tout ce qu’il y a de plus honnête en Français - un jugement qu’il m’est d’autant plus facile de porter que je ne l’ai pas lu en anglais). Aidé par un copain journaliste (Stephen Dubner), Steven Levitt (brillant allumé) y applique les principes d’économie à de nombreux champs d’application saugrenus (marché de la drogue, prénoms donnés aux enfants…), et en tire de géniales conclusions. Il parvient par exemple à démontrer que la baisse de la criminalité dans les années 1990 aux Etats-Unis n'est pas due aux nouvelles politiques de tolérance zéro ou à l'augmentation des effectifs policiers, mais simplement à la légalisation de l'avortement survenue en 1973 : moins d'enfants non désirés, donc - et il ne s'agit là que de statistiques - moins d'enfants mal éduqués, et moins de criminalité. Autre illustration du concept, Levitt explicite cet étrange phénomène qui fait que la plupart des dealers dans les gangs US habitent chez leur mère : loin de vouloir se planquer, c'est qu'en fait la structure des gains dans ces gangs est tellement pyramidale que les sous-fifres ne gagnent, sur ce marché, pas de quoi se payer une piaule (remarque ça a peut-être changé récemment cette histoire).
Le bouquin a été prolongé par un
blog prolixe, dont le seul défaut est d’être en anglais.

Mais trêve de détours : saluons le travail papier des Econoclastes. Alexandre Delaigue et Stéphane Ménia, anciens de Normale Sup Cachan agrégés d’éco et de gestion, sont de cette même trempe d’économistes rigolos. C’est même à mon sens eux qui ont su rendre caduc cet oxymore. Ils ont lancé leur site il y a de cela 8 ans (peu de sites peuvent se targuer d’une telle ancienneté), leur blog il y a 4 ans. De vrais pionniers de la blogosphère économique, qui ont suscité moult vocations. Contrairement aux Freakonomists donc, ils ont eux commencé par un blog, puis concocté un chouette bouquin. Il est ,il est pas cher, et on l'aime même s’il y a une grosse faute sur la 4e de couv’.

Rien à voir, mais une expérience à la limite de l’anthropologie et de la sociologie m’a récemment rappelé que la dernière des classes sociales qui subsiste en France est la grande bourgeoisie.

Enfin, le petit scandale du quotidien, découvert dans le Canard Enchaîné, qui relaie une info du Point : les traders qui se sont fait virer comme des malpropres des lumineuses salles de marché de la City - après avoir été contraint et forcé de s’exiler parce que c’est vrai qu’en France on paie bien trop d’impôts et que là-bas tout le monde peut bosser il suffit de le vouloir et moi chuis un winner et je vous emm… - se carapatent la queue entre les jambes et viennent allègrement nous plomber les comptes de l’ANPE. Il leur suffit de retouner 3 burgers au McDo (ou d’effectuer n’importe quelle tâche rémunérée par Chèque Emploi Service) pour pouvoir prétendre sans scrupule aux allocations chômage. Oh trois fois rien, juste de quoi subsister : 57,4% de leur salaire outre Manche, plafonné à 6 400 euros mensuels, pendant 23 mois. Effectivement, il s’agit d’un plafond, pas d’un plancher. Mais pour la plupart des traders de Londres, 11 000 euros de salaire (£ 9000 à la louche), c’est – ou du moins c’était – un plancher, pas un plafond.

Une telle absence de conscience citoyenne - pour ne pas dire morale - me laisse coi.

2 commentaires:

Unknown a dit…

Salut Pied !
Merci pour le conseil de lecture. Manifestement Paerson préempte nos blogeurs préférés (cf. http://www.pearson.fr/livre/?GCOI=27440100962760 : pas révolutionnaire mais complet et qui met bien les choses en perspectives).
Drôle sinon (rapport à notre pizza)que tu cites Colombi qui cite les Pinçon-Charlot, parce que ce sont eux, justement, rares sociologues spécialistes des riches, qui expliquent le rapport à l'espace (notamment domestique) très particulier de ceux-ci. Entre salons immenses et hauteurs de six mètres sous plafond, forcément on "apprend" à bouger différemment et cela crée une certaine "classe" (tiens tiens !) qui n'a cependant rien de "naturelle". Quand à l'inverse, les pauvres vivent, eux, d'exiguïté et de promiscuité (ce que décrit très bien Ken Loach dans ses films je trouve) ce qui les rend forcément plus embarrassés de leurs corps.
Une situation (exiguité et promiscuité) dans laquelle on aimerait bien coller nos petits copains traders de retour de leur eldorado !

Pied-à-terre a dit…

Même si certains ont visiblement su préempter l'espace malgré leur condition originelle de pauvreté :

http://www.musicspot.fr/video/reportages/ntm-bercy-2008-la-video-du-concert-10002066.htm

:-)